Je m’appelle Jean-Baptiste et je suis parti trois mois en mission dans la communauté des Xavériens de Bangkok. Cette dernière est composée de prêtres missionnaires originaires des quatre coins du monde et vivant en communauté avec des laïcs. Je me suis donc retrouvé à vivre au quotidien avec deux prêtres italiens, Alessandro et Alessio, et quatre jeunes volontaires thaïs. La mission des Xavériens à Bangkok se situe dans le quartier de Khlong Toey. Ce quartier abrite le plus grand bidonville de Bangkok où près de 90 000 personnes vivent. Le travail des Xavériens consiste donc à aider ces personnes dans leur vie de tous les jours.
Visite gratuite
La partie la plus importante de la mission est de remédier à la pauvreté la plus répandue : la solitude. Par la pratique de la visite gratuite, à l’improviste, les Xavériens se mettent à disposition des habitants de Khlong Toey. J’ai donc offert une présence et une oreille attentive dans ce bidonville. Ces moments de partage avec les personnes âgées et les malades m’ont permis de découvrir des hommes et des femmes incroyables. L’une est handicapée mentale, elle a des difficultés à marcher et elle est muette. Pourtant, elle se démène tous les jours pour traverser Khlong Toey avec son chariot à la recherche de déchets en plastique. La revente de ces derniers lui permet parfois de manger à sa faim. Mais, étant la seule à travailler dans une famille de cinq personnes, il ne lui reste souvent pas grand-chose pour elle. Malgré cela, tous les jours, cette femme a une joie débordante et contagieuse. Je n’avais jamais vu un aussi beau sourire de ma vie.
Une autre a 75 ans et elle s’occupe au quotidien de son petit-fils handicapé physique de 23 ans. Elle veille sur lui à toute heure du jour et de la nuit car il peut s’étouffer à n’importe quel moment. Durant la nuit, elle ne dort que par période de trois heures afin de le faire boire régulièrement. Cette femme est d’une bonté immense et, contrairement à ce que nous pouvons penser, elle est dans une forme olympique.
Se sentir en activité
Un homme s’occupe seul de sa famille. Il est musicien et il travaille la nuit pour gagner de l’argent. Le jour, il prend soin de sa femme, ainsi que de la plus jeune de ses enfants, lorsque les deux autres sont à l’école. Son épouse a 35 ans et elle est paralysée des jambes depuis quelques mois. Par le passé, elle aidait son mari aux tâches familiales et elle tenait un magasin de nourriture dans le bidonville. Désormais, elle ne peut plus bouger de son lit. Mais, l’homme de sa vie a eu l’idée géniale de suspendre la nourriture à des barres au-dessus de son lit. Elle peut ainsi toujours vendre, tenir son magasin et donc se sentir en activité.
La seconde partie de la mission des Xavériens est d’aider les personnes du bidonville à envisager un avenir meilleur. De nombreuses activités sont organisées avec les enfants : accueil du soir, patronage, cours d’anglais, tournois de foot inter bidonvilles, balades à vélo, spectacle de magie… La plupart des enfants n’ont pas de structure familiale stable et ils s’éduquent seuls et éduquent leurs frères et sœurs.
Aimer sans conditions
J’ai pu découvrir des jeunes en manque d’amour et avec des rêves plein la tête. C’est dans ce domaine que les pères Alessandro et Alessio m’ont le plus impressionné. Ils ont une capacité incroyable à redonner confiance aux jeunes, à leur montrer que quelqu’un compte sur eux. Il suffit de regarder comment les enfants se comportent quand ils rencontrent les Pères pour comprendre combien ils tiennent à ces deux hommes.
Tout au long de ma mission, j’ai énormément appris auprès de cette communauté des Xavériens. Les prêtres et les jeunes volontaires thaïs m’ont montré comment aimer sans conditions. C’est édifiant de rencontrer à l’autre bout du monde des jeunes engagés depuis plusieurs années au service des pauvres. Ils font preuve d’une grande maturité et d’un sens de l’humain remarquable. Quand je suis parti en mission, j’avais envie de donner, d’aider et de servir. Mais, je me suis vite rendu compte qu’on reçoit bien plus qu’on ne donne. Auprès des plus démunis, j’ai appris à mieux me connaître. Je me suis découvert des qualités que je n’avais encore jamais exploitées. J’ai considérablement évolué dans ma manière d’aimer et d’être aimé. Enfin, la joie ressentie durant ma mission m’a confirmé que lorsque nous choisissons de suivre Dieu, nous nous joignons à un projet d’amour. C’est pourquoi, j’invite toute personne tentée par l’aventure de la mission de faire confiance au Seigneur et de lâcher prise.
Jean-Baptiste, volontaire MEP
Article paru dans la Revue MEP de décembre 2018 n°544. Recevoir gratuitement la Revue MEP