Infirmière de métier depuis plus de deux ans, j’ai 24 ans. À l’obtention de mon diplôme, l’idée de partir en volontariat m’a animée. Pour être totalement prête à affronter cette grande aventure, j’ai décidé́ de travailler, d’abord, pendant une année, en France, dans un hôpital, afin d’avoir une expérience plus solide à mettre au service de l’association. Un an plus tard, j’atterrissais en Thaïlande, plus précisément au cœur du bidonville Khlong Toei, à Bangkok.
Ma mission, ici, est d’être infirmière, d’apporter des soins aux personnes qui en ont besoin, d’aider les pères xavériens qui encadrent ma mission à savoir si telle personne a besoin d’aller à l’hôpital pour des soins plus importants. C’est aussi une vraie mission de présence. Tous les jours, nous allons visiter des personnes dans les bidonvilles, nous leur offrons de la nourriture et nous essayons, du mieux que nous pouvons, de leur apporter aussi de la joie. Les personnes que nous visitons sont toujours très heureuses de nous voir, de nous accueillir et de discuter avec nous. C’est une sacrée expérience humaine que nous vivons au quotidien.
Après quelques mois au sein du bidonville, j’ai appris à lâcher prise, à me détacher du matériel, à aller à la rencontre de l’autre avec plus de simplicité́. Tous les jours, ce sont de nouvelles joies, de nouvelles découvertes, même après neuf mois sur le terrain. J’ai pu construire des relations particulières avec certaines personnes du bidonville. Cette expérience m’apprend beaucoup sur mon métier : j’ai appris à faire des soins dans des conditions bien différentes de celles que je connaissais en France, à l’hôpital. L’hygiène des lieux n’est pas toujours au rendez-vous, mais c’est la réalité́ du terrain et je dois faire avec. J’essaie de m’adapter au mieux pour conserver rigueur et hygiène dans les soins. La communication est plus entravée ici, à cause de la barrière de la langue. Les volontaires thaïs qui habitent avec nous ont pris le soin de me donner des cours de thaï̈. Ils m’ont donné́ le vocabulaire adapté à mon métier, ce qui me permet de me débrouiller plus facilement dans ce domaine. Je n’ai pas la même façon de communiquer qu’en France. N’étant pas bilingue en thaï, je ne peux réconforter personne par la parole. C’est là que l’écoute et la présence prennent plus de sens et plus d’importance.
Les joies au quotidien sont très nombreuses. Elles peuvent aller d’un sourire spontané́ à l’émerveillement devant un temple bouddhiste avec cette architecture si propre à l’Asie. Je ressens toujours beaucoup de joie et aussi un peu de fierté́ quand, après la prise en charge d’une personne dans le bidonville pour le pansement d’une plaie, je découvre que celle-ci a guéri. Je ressens tous ces sentiments plus fortement quand les personnes me remercient.
Les difficultés de la mission sont, je pense, communes aux autres missions : l’éloignement avec la famille, les amis, la France qui peut parfois jouer sur le moral, mais qui reste une difficulté́ largement surmontable (dans mon cas). Aussi, la barrière de la langue s’estompe au fur et à mesure de son apprentissage. Les différences culturelles, le savoir-vivre (retirer ses chaussures avant d’entrer dans une maison, ne pas montrer ses pieds à Dieu et, par conséquent, ne pas allonger ses jambes à la messe, mais aussi dans les temples bouddhistes), ou encore la nourriture, peuvent nous décontenancer au début. Et puis, il n’est pas facile de s’adapter au climat humide des températures bien plus enlevées qu’en France. J’ai également eu l’occasion de pratiquer certains soins très précis et dans des conditions très difficiles, des expériences qui me marqueront à vie.
Je repartirai en France avec une plus grande ouverture d’esprit, envers d’autres cultures, ce que je n’avais pas autant quand j’ai commencé ma mission, de l’adaptation et j’espère de la débrouillardise. J’ai hâte de voir les fruits de cette dernière quand je rentrerai et la façon dont je prendrai en charge mes futurs patients.
Extrait de la revue MEP n°601
Migrants d’Asie : Chrétiens citoyens du monde